mardi 4 août 2009

La tirade du nez

Cyrano de Bergerac La tirade des nez (acte 1, scène 4)

Cyrano
Ah ! Non ! C'est un peu court, jeune homme !


On pouvait dire... oh ! Dieu ! ... bien des choses en somme...En variant le ton, —par exemple, tenez :


Agressif : « moi, monsieur, si j'avais un tel nez,

Il faudrait sur le champ que je me l'amputasse ! »


Amical : « mais il doit tremper dans votre tasse :

Pour boire, faites-vous fabriquer un hanap ! »



Descriptif : « c'est un roc ! ... c'est un pic... c'est un cap !

Que dis-je, c'est un cap ? ... c'est une péninsule ! »



Curieux : « de quoi sert cette oblongue capsule ?

D'écritoire, monsieur, ou de boîte à ciseaux ? »



Gracieux : « aimez-vous à ce point les oiseaux

Que paternellement vous vous préoccupâtes

De tendre ce perchoir à leurs petites pattes ? »



Truculent : « ça, monsieur, lorsque vous pétunez,

La vapeur du tabac vous sort-elle du nez

Sans qu'un voisin ne crie au feu de cheminée ? »



Prévenant : « gardez-vous, votre tête entraînée

Par ce poids, de tomber en avant sur le sol ! »



Tendre : « faites-lui faire un petit parasol

De peur que sa couleur au soleil ne se fane ! »



Pédant : « l'animal seul, monsieur, qu'Aristophane

Appelle hippocampelephantocamélos

Dut avoir sous le front tant de chair sur tant d'os ! »



Cavalier : « quoi, l'ami, ce croc est à la mode ?

Pour pendre son chapeau c'est vraiment très commode ! »



Emphatique : « aucun vent ne peut, nez magistral,

T'enrhumer tout entier, excepté le mistral ! »



Dramatique : « c'est la Mer Rouge quand il saigne ! »



Admiratif : « pour un parfumeur, quelle enseigne ! »


(...)



Naïf : « ce monument, quand le visite-t-on ? »


Respectueux : « souffrez, monsieur, qu'on vous salue,

C'est là ce qui s'appelle avoir pignon sur rue ! »


Voilà ce qu'à peu près, mon cher, vous m'auriez dit

Si vous aviez un peu de lettres et d'esprit

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