vendredi 1 août 2008

L' inoublié


Michel Rivard a bien connu Jutra. Ce dernier l'a maintes fois abrité entre les murs de sa maison du carré St-Louis. Claude Jutra s'est enlevé la vie en 1986, parce que l'oubli, dû à la maladie d'Alzheimer dont il souffrait, lui pesait trop lourd.
Cette chanson parle de Jutra, mais aussi de la mémoire qui est, bien souvent, trop souvent une faculté qui oubli, ce qu'elle veut bien oublier, même l'essentiel, parfois.
Cette chanson est un cri d'amour à l'amour, à la perénnité de l'amour.
La mémoire, pour un artiste, est l'âme de sa conscience d'artiste, c'est une des essences de sa création.
Et lorsque l'essentiel, nous quitte, alors, on part, nous aussi.
C'est ainsi que Claude Jutra nous a quitté.
Mais d'une certaine façon seulement.
Autrement, il demeure inoublié.
Merci Michel Rivard pour ce texte colossal et poétique comme l'était CJ.

L'oubli
Paroles et musique : Michel Rivard.1992 Les Éditions Sauvages

Cette chanson est dédiée à la mémoire du cinéaste Claude Jutra (1930-1986).


C'était un homme imaginaire
Imagineur d'objets trouvés
Un inventeur de faits divers
Un rêveur de réalités
Il habitait en solitaire
Une maison du Carré St-Louis
Deux ou trois chats
Beaucoup d'lumière
De temps à autre un vieil ami
Il aimait l'ordre et la douceur
Et derrière ses petites manies
Se cachait l'idée du bonheur
Sans faire de mal
Sans faire de bruit
Mais dans le noir de sa mémoire
S'ouvrait le trou blanc de l'oubli
L'oubli, l'oubli
L'oubli des mots
L'oubli des gestes
Oubli de tout ce temps qui reste
Prisonnier de ce funeste oubli
Il avait aimé une femme
Mais c'était il y a très longtemps
Plutôt que d'y laisser son âme
Il avait viré comme le vent
Maintenant
Des garçons de passage
Lui dérobaient des bouts de sa vie
Il dessinait leurs doux visages
Eux repartaient sans dire merci
Il notait tout dans un carnet
Le nom des gens
L'odeur des choses
Et quand le vent virait morose
Pour se souvenir il relisait
Mais il voyait entre les lignes
Grandir le trou blanc de l'oubli
L'oubli, l'oubli
L'oubli des mots
L'oubli des gestes
Oubli de tout ce temps qui reste
Prisonnier de ce funeste oubli
Un jour en rentrant du café
Où chaque matin venait s'asseoir
Par le trou blanc de sa mémoire
Il sentit sa vie s'en aller
Il écrivit comme à l'école
Son nom en lettre détachées
Puis il épingla sur le col
De son manteau
Le bout de papier
Dans l'eau glacée
Du Saint-Laurent
Il revit couler son enfance
Et offrit son corps en silence
Au démon qui suit le courant
Je chante
Pour ne pas qu'il meure
Je chante pour tuer l'oubli
L'oubli, l'oubli
L'oubli des mots
L'oubli des gestes
Oubli de tout ce temps qui reste
Prisonnier de ce funeste oubli
L'oubli, l'oubli
L'oubli des mots
L'oubli des gestes
Oubli de tout ce temps qui reste
Prisonnier de ce funeste oubli

2 commentaires:

Lady Jaye a dit…

Une question que je me pose, peut-être était-ce juste moi qui avait sauté aux conclusions quand j'avais 18 ans, mais il m'a toujours semblé que la chanson Le plus fou des deux de Rivard (sur son premier album solo, Méfiez-vous du grand amour) parlait de son amitié avec Jutra. Par contre, en faisant des recherches en ligne, rien pour confirmer ou pas cette idée...

atalante a dit…

CLady Jaye,
je crois que vous confondez la chanson l'oubli avec le plus fou des deux. Possible qu'ausi cette dernière chanson est aussi reliée à Jutra. Vous m'apprenez quelque chose. Comme ils ont été très liés.. Mon intuition me dit que non..Il faudrait le demander à l'auteur lui-même en lui écrivant chz audiogram.