mardi 1 septembre 2009

Le train de la Furka ressuscité




Cet été, des centaines de volontaires se relaient afin de permettre au train à vapeur de relier Oberwald
Toute pimpante, fumante et brûlante de désir, les chromes lustrés, la HG «Weisshorn» ne fait pas son âge. La locomotive à vapeur est pourtant plus que centenaire puisqu’elle est sortie des ateliers de Winterthour en 1902. Pour éviter que sa belle mécanique ne se grippe, durant l’été, chaque week-end, elle emmène des centaines de passagers entre Gletsch (VS) et Realp (Uri). Ce samedi, les nuages sont solidement accrochés au glacier du Rhône, mais les voyageurs se pressent déjà sur le quai de la vieille gare de Gletsch, située à 1760 mètres d’altitude.
Trésors alpinsDans environ deux heures, grâce au train à vapeur de la Furka, ils seront en Suisse centrale. Le trajet est long de treize kilomètres. Il marie trésors alpins et joyaux d’architecture ferroviaire, comme le fameux pont de Steffenbach. Un ouvrage escamotable qui, à cause des avalanches, est démonté chaque automne, avant d’être remis en place dès la fonte des neiges. Appareil photo en main, Claude Solioz mitraille la machine vapeur, comme s’il voyait la locomotive pour la première fois. «Ce train, c’est un condensé d’histoire suisse», résume ce Sédunois, membre depuis une dizaine d’années de la section romande de l’Association de la ligne sommitale de la Furka (ALSF).



Les 7700 membres (tous bénévoles) de cette dernière s’apprêtent à vivre un événement exceptionnel: la réhabilitation complète de la ligne historique de la Furka entre Oberwald (VS) et Realp. Celle-ci avait été abandonnée en 1982, après l’inauguration de l’actuel tunnel de la Furka, qui permet aux trains de traverser la montagne été comme hiver. «Nous prévoyons une ouverture du dernier tronçon entre Oberwald et Gletsch l’été prochain», se réjouit Paul Güdel, chef marketing de la ligne sommitale de la Furka DFB SA, la société qui exploite le train à vapeur. Comme les membres de l’ALSF, ce responsable d’une fiduciaire lucernoise travaille gracieusement pour ce projet. Il tient déjà, ravi, la future plaquette des horaires 2010. «Notre train transporte chaque année 26 000 voyageurs, mais ils sont essentiellement alémaniques; avec le nouveau terminus d’Oberwald, les Romands devraient être plus nombreux à venir», espère Paul Güdel. Sur le chantier du futur terminus d’Oberwald, des volontaires de la section de Suisse centrale s’activent. Chaque été, les 23 sections de l’association se relaient pour des semaines de travail. Les Romands sont venus en juillet. Ils ont été suivis par des… bénévoles allemands. Belges, Néerlandais ou Français participeront aussi à l’ouvrage. L’ALSF est une multinationale de passionnés qui ne parlent qu’une seule langue: celle du train à vapeur.
Dans leurs impeccables tenues orange fluo, les bénévoles schwytzois aplanissent consciencieusement l’énorme butte de terre qui accueillera bientôt les rails. Sous l’œil vigilant du contremaître Walter Willi, le chef des constructions. Bleu de travail, teint bistre, ce cadre d’une grande entreprise de construction d’Uri consacre la majeure partie de ses week-ends à la ligne de la Furka. Et cela dure depuis vingt-trois ans. «Nous allons installer une crémaillère qui traversera la route», explique fièrement Walter Willi. «Elle sera rétractable, c’est une première mondiale», poursuit-il. Ici, les volontaires mettent leurs compétences professionnelles au service de l’ALSF. Beaucoup sont maçons, ingénieurs, dessinateurs en bâtiment ou cheminots. «Mais il y a aussi des assureurs comme moi», sourit Philippe Roux, le président de la section romande. «Au-delà des trains, nous avons tous un goût prononcé pour l’utopie», raconte-t-il tout en marchant sur le ballast de la voie qui mène à Gletsch. Ici, d’autres volontaires descendent vers la vallée de gros troncs de mélèze. Sans l’engagement des bénévoles, la ligne n’aurait jamais été réhabilitée.

Le président de la section romande voit arriver l’achèvement des travaux avec un mélange de joie et de vertige: «J’espère que nos membres continueront de participer à l’entretien de la voie ferrée.» Chaque année, en mai, les bénévoles déblayent près de 100 000 mètres cubes de neige afin de permettre le passage du train à vapeur. Sans parler des réparations de la voie, fréquemment endommagée par des éboulements. Les membres de l’Association de la ligne sommitale de la Furka ne sont pas près de passer leurs week-ends devant la télévision.

1 commentaire:

Patricia a dit…

encore un voyage par chez moi.. aurais-tu une âme d'Helvète par hasard?